5 PIÈGES RH À ÉVITER QUAND L’ÉCONOMIE DEVIENT INCERTAINE
Introduction
Il faut porter des œillères ou être de mauvaise foi pour l’ignorer : l’économie Française vacille. Déficit commercial de 164 milliards d’euros en 2022 (un record), déficit public atteignant 5,5% du PIB en 2023, abaissement de la note souveraine de la France par l’agence Moody’s en 2024, et il ne s’agit là encore que de quelques exemples parmi d’autres.Or quand l’activité ralentit et que l’incertitude économique s’installe, les réflexes budgétaires, eux, s’activent. Dans une majorité d’entreprises, cela se traduit par un recentrage rapide (parfois même brutal) sur les coûts dits « productifs » au détriment des dépenses jugées secondaires, au premier rang desquels on retrouve la formation, l’accompagnement des Ressources Humaines, les outils transverses et plus généralement tous les projets qui n’apparaissent pas comme immédiatement rentables.
Difficile, de prime abord, d’en vouloir aux entreprises qui adoptent cette stratégie. Et pourtant, mal cibler les coupes à effectuer peut engendrer des effets contre-productifs tout aussi dévastateurs que la crise économique elle-même : désorganisation de la production, perte de repères stratégiques, démobilisation ou fuite des compétences clés. Autrement dit, mettre la tête dans le sable permet de se protéger immédiatement du danger, mais cela empêche également de garder un œil sur ce danger pour anticiper sa fin.
C’est pourquoi cet article va s’atteler à prendre un peu de recul et proposer d’identifier cinq pièges fréquents pour les RH en cas de situation économique difficile, ainsi que les clés pour les contourner avec lucidité.
Piège 1 – Produire sinon rien
Lorsqu’une crise s’annonce, les budgets “hors production” sont souvent les premiers visés : les entretiens d’évolution sont suspendus, les formations reportées sine die, les recrutements placés en veille. Globalement, l’ensemble des projets RH se retrouve subitement à l’arrêt pour recentrer les moyens humains et financiers vers la production.Pourtant, ce type de réaction à court terme, qui donne l’impression d’agir concrètement dans le bon sens et qui peut même se traduire par des résultats positifs comptablement, va affaiblir à moyen terme les fondations humaines de l’entreprise. Les collaborateurs auront en effet toujours du mal à pardonner à leur direction d’avoir fait le plein choix de la production plutôt que de l’évolution humaine des salariés, quand bien même la situation y appelle. Une confiance ébranlée qui, en sus d’affecter le moral des effectifs durant la crise, agira par ailleurs comme un véritable frein à la relance une fois la tempête passée.
Pour se prémunir de ce risque, l’entreprise va « simplement » devoir se montrée mesurée plutôt que radicale. S’il est tout à fait légitime de revoir les priorités, et que la baisse d’investissements en temps et moyens financiers dans l’évolution du facteur humain de l’entreprise apparaît pertinente, il est particulièrement important de mettre la lumière sur l’aspect temporaire de la mesure et de rappeler que les collaborateurs ne seront pas considérés comme une variable d’ajustement.
Piège 2 – Confondre charge et investissement
En période d’incertitude, il est courant de geler d’entrée de jeu l’ensemble des investissements d’un côté, et de chercher à rogner le plus possible les charges de l’autre. Pourtant, s’il s’agit dans les deux cas d’actifs sortants non affectés à la production directe, il existe des différences fondamentales entre les deux.
Remplacer des séminaires extérieurs par des formats internes consiste en une optimisation qui vient alléger les charges. Adapter l’organisation du travail (télétravail, bureaux partagés …) de façon à réduire la surface de bureaux nécessaire relève également de la diminution des charges. Abandonner un plan de formation à la sécurité, en revanche, n’est pas un allégement de charge mais une suppression d’investissement. A défaut d’y affecter une enveloppe budgétaire immédiate, il faudra supporter un coût différé bien plus lourd : augmentation du risque accidentogène, multiplication des non-conformités, perte au fil de l’eau de savoir-faire.
Il apparaît avec certitude qu’à l’inverse des charges qui peuvent et doivent être mises en compétition afin de les réduire au mieux, les investissements, eux, viennent préserver la performance future de l’entreprise une fois la crise passée, et à ce titre ne doivent pas constituer un levier financier.
Remplacer des séminaires extérieurs par des formats internes consiste en une optimisation qui vient alléger les charges. Adapter l’organisation du travail (télétravail, bureaux partagés …) de façon à réduire la surface de bureaux nécessaire relève également de la diminution des charges. Abandonner un plan de formation à la sécurité, en revanche, n’est pas un allégement de charge mais une suppression d’investissement. A défaut d’y affecter une enveloppe budgétaire immédiate, il faudra supporter un coût différé bien plus lourd : augmentation du risque accidentogène, multiplication des non-conformités, perte au fil de l’eau de savoir-faire.
Il apparaît avec certitude qu’à l’inverse des charges qui peuvent et doivent être mises en compétition afin de les réduire au mieux, les investissements, eux, viennent préserver la performance future de l’entreprise une fois la crise passée, et à ce titre ne doivent pas constituer un levier financier.
Piège 3 – Négliger la communication interne
Lorsque la situation économique dérape, les premières réactions visent, et c’est bien normal, à chercher comment en endiguer les effets négatifs sur l’entreprise. L’heure est donc à la constatation, puis aux hypothèses auxquelles succèdent les prises de décision, et enfin vient l’attente pour voir si la correction de cap porte ses fruits. Tout un processus de réaction en chaîne qui, le plus souvent, omet totalement la communication verticale à destination des collaborateurs.
Des collaborateurs qui sont pourtant concernés au premier chef par les décisions impactant l’opérationnel. Être témoin, sans explication, de coupes budgétaires opérées dans les investissements d’un côté, et dans les processus RH comme la formation, les habilitations ou les entretiens de l’autre, c’est avant tout alimenter l’angoisse déjà présente du fait de la situation économique elle-même.
À l’inverse une communication claire, y compris sur des décisions difficiles, permet le plus souvent d’en faire comprendre le sens, et ce faisant de préserver l’engagement des équipes. C’est un droit pour les collaborateurs de ne pas avoir confiance en l’avenir, en revanche il est de la responsabilité de l’entreprise de leur faire avoir confiance en elle.
Des collaborateurs qui sont pourtant concernés au premier chef par les décisions impactant l’opérationnel. Être témoin, sans explication, de coupes budgétaires opérées dans les investissements d’un côté, et dans les processus RH comme la formation, les habilitations ou les entretiens de l’autre, c’est avant tout alimenter l’angoisse déjà présente du fait de la situation économique elle-même.
À l’inverse une communication claire, y compris sur des décisions difficiles, permet le plus souvent d’en faire comprendre le sens, et ce faisant de préserver l’engagement des équipes. C’est un droit pour les collaborateurs de ne pas avoir confiance en l’avenir, en revanche il est de la responsabilité de l’entreprise de leur faire avoir confiance en elle.
Piège 4 – Oublier la valeur stratégique des fonctions support
En période de tension, les fonctions considérées par certains comme “non productives” peuvent vite passer pour un luxe. Ressources Humaines, QHSE, service IT, service comptabilité sont des exemples non exhaustifs de services sur lesquels les financiers de l’entreprise vont s’attarder à l’aide d’une redoutable loupe bénéfice/risque. Et si ce sont souvent ces fonctions support qui assurent la fluidité, la sécurité et la conformité de l’ensemble de l’entreprise, la ligne « bénéfice » restera malheureusement le plus souvent à zéro. Pourtant, couper dans ces ressources équivaut à transférer la pression supportée par ces services directement sur les opérationnels en les laissant seuls responsables de la productivité de l’entreprise. Pour illustrer simplement en quoi cela constitue une erreur, faisons une analogie simple avec la voiture : une voiture n’a besoin que d’un moteur, quatre roues et un volant pour circuler. Mais n’est-elle pas plus efficace et moins risquée lorsque l’on y ajoute des clignotants, des essuie-glaces, des ceintures de sécurité et des rétroviseurs ? Ce sont exactement ces rôles qu’occupent les fonctions support. Elles n’ont en effet pas vocation à produire, elles existent pour rendre possible la production. Séparez-vous de l’ensemble de ces services et vous vous retrouverez à conduire une voiture en fermant les yeux.Piège 5 – Décider en autarcie
Si les décisions relatives à la vie et la pérennité de l’entreprise n’appartiennent pas nécessairement à tout un chacun, il faut reconnaître que les décisions RH et budgétaires sont le plus souvent prises en cercle restreint, sans consultation extérieure ou tout de moins, en l’absence des opérationnels.Or les équipes de terrain sont parfois très bien placées pour proposer des solutions concrètes, sobres ou pragmatiques à des problématiques pour lesquelles les fonctions décisionnaires ne disposent que d’un unique point de vue. Par ailleurs, en n’oubliant que l’intérêt de l’entreprise est également celui de l’employé, offrir la possibilité aux collaborateurs d’être actifs dans le processus de sauvegarde de l’entreprise et donc, in fine, de leur emploi, sera une source de motivation d’autant plus grande à proposer de l’aide.
Associer les opérationnels et les fonctions support aux ajustements à opérer, plutôt que de les leur imposer, va donc non seulement contribuer à les faire accepter avec beaucoup plus de simplicité, mais pourra également se muer en vecteur de nouvelles idées à même de varier les perspectives des décideurs.
Conclusion : 5 pièges RH à éviter quand l’économie devient incertaine
Quand l’entreprise est en difficulté du fait de la situation économique, réduire l’ensemble des coûts pour se donner de l’air peut s’apparenter à mettre un pansement sur une blessure ouverte : c’est cacher sans soigner.Et de fait, les entreprises les plus résilientes ne sont pas celles qui ont supprimé tous leurs postes dit “non essentiels” mais à l’inverse celles qui ont compris que le sens, la structure et la confiance sont des ressources aussi critiques que les matières premières ou les machines.
En temps calme comme en temps troublé, la lucidité stratégique consiste à ajuster sans abîmer. À réduire sans déshumaniser.